
En 2020, alors que bien des personnes étaient sous le choc de la pandémie de COVID-19, nous avons vu quelque chose que beaucoup d’entre nous ont toujours su mais n’ont pas toujours vu.
Des soulèvements se produisent dans tout le pays pour lutter contre le racisme anti-Noir, la violence policière, le colonialisme et la souveraineté Autochtone. Auparavant, certain.e.s ont pu penser que ces sujets étaient incompatibles, séparés par la race et les communautés, mais les jeunes de l’Île de la Tortue nous ont montré le contraire. Ces jeunes nous ont montré que la solidarité entre les Noir.e.s et les Autochtones est vivante et florissante, surtout dans les moments les plus difficiles.
Que ce soit lors des manifestations organisées dans le cadre du Mois de l’histoire des Noir.e.s à l’occasion de l’Assemblée législative de la Colombie-Britannique ou lors des rassemblements Black Lives Matter organisés dans les réserves, CRE a pu constater à maintes reprises que les communautés racisées se tenaient debout et se soutenaient mutuellement, non seulement en cas de crise sanitaire, mais aussi de crise de souveraineté en matière de santé. Nous avons reconnu que le travail de réconciliation allait au-delà de la simple réconciliation avec l’état colonisateur. Que l’acte de réconciliation doit aussi être réalisé entre les communautés racisées, plus souvent qu’autrement. Alors, dans cette conversation, où est-ce que cela nous a menés en tant qu’organisation ? Cela nous a donné l’occasion de créer un espace qui pourrait favoriser davantage ces conversations.
Nous nous sommes tournés vers des membres de notre équipe qui vivaient à l’intersection de ces identités et, en collaboration avec d’autres, nous avons créé l’initiative Autochtones et Noir.e.s solidaires. Destiné aux jeunes Noir.e.s et Autochtones de l’Île de la Tortue, le programme visait à utiliser l’art pour souligner la proximité et les relations entre ces deux communautés. Grâce à ce programme, les jeunes ont reçu les outils et les ressources nécessaires pour créer des œuvres d’art qui explorent cette relation. Et en retour, nous avons réalisé une exposition d’art qui met en lumière ce qui a été appris ou découvert, au sein de nos communautés.
Les histoires qui ne sont pas racontées vous permet de voir le chemin parcouru par ces jeunes artistes. Par le biais du cinéma, de la peinture, de la photographie et du tatouage, les jeunes participant.e.s de l’initiative Autochtones et Noir.e.s solidaires vous permettent d’explorer une conversation qui se déroule sur ces terres depuis des siècles.
CRE espère qu’à travers cette exposition, vous entamerez la conversation avec nous et d’autres personnes.




Profil de l’artiste: Dahlila Charlie
Mon nom est Dahlila Charlie, mes pronoms sont elle/la, et je suis une artiste salish du littoral de Victoria, en Colombie-Britannique. J’ai grandi entourée de gens artistiques et créatifs, ce qui m’a inspirée à devenir artiste moi-même.

Le type d’œuvres que j’aime créer, je le fais à partir d’histoires, de mythes et d’enseignements culturels qui incorporent la ligne de forme des Salish du littoral avec la nature et le réalisme dans le médium de la peinture acrylique. La peinture a toujours été une de mes passions. J’ai commencé à apprendre à peindre au secondaire et j’ai participé à des peintures murales à Victoria, et j’ai continué à apprendre avec des mentors et des techniques autodidactes.
Grâce à mon travail artistique, je peux me connecter à mes racines en tant que femme Autochtone et l’utiliser comme un moyen de partager mes pensées et mes idées pour faire évoluer un artiste.
J’ai eu du mal à trouver des idées quand j’ai pensé à ce projet. Parce que je suis toujours en train de faire des recherches et d’apprendre des choses sur la solidarité entre les personnes Noir.e.s et Autochtones, et puis, j’ai eu une révélation sur le fait de faire un Phénix parce qu’un Phénix «est un oiseau qui vit longtemps et qui se régénère cycliquement ou qui renaît», j’ai aussi l’impression qu’il symbolise la force et que même si les personnes Noir.e.s et Autochtones ont souffert du génocide, de l’oppression et de l’esclavage, nous avons quand même survécu et nous sommes des personnes fortes et résistantes.
Faire un projet comme celui-ci m’a forcé à m’ouvrir et à me pousser dans mon travail artistique parce que je me considère comme un artiste émergent, qui continue d’apprendre et de participer à des programmes comme celui de l’initiative Autochtones et Noir.e.s solidaires. J’ai l’habitude de créer de l’art personnel, plutôt que de l’art avec des thèmes politiques, donc participer à un programme comme celui-ci m’a aidé à réaliser que j’ai une voix, et que ma voix compte.
Profil de l’artiste: Desiree Givens
Desiree Givens (elle/la) est une vidéographe de la Première nation Yuułuʔiłʔatḥ (Ucluelet). Ses ancêtres sont Afro-Américains du côté paternel et Nuu-chah-nulth du côté maternel. Elle a grandi dans l’État de Washington et réside actuellement à Victoria, en Colombie-Britannique, sur les territoires traditionnels et non cédés des peuples Lək̓ʷəŋən, dont les nations Esquimalt et Songhees.

Desiree travaille à temps plein en tant que planificatrice communautaire et considère que le film est un outil puissant pour créer une communauté et raconter des histoires. Pendant ses études universitaires, elle a appris les bases de la production cinématographique et a acquis de l’expérience en travaillant en collaboration avec différentes équipes de production pour créer des courts métrages qui mettent en valeur les expériences et les histoires des communautés Autochtones.
Le projet de Desiree a été inspiré par son désir d’accroître la représentation des Afro-Autochtones dans le cinéma. Elle a toujours été en lutte avec son identité tout au long de sa vie, ayant parfois l’impression de ne pas appartenir à ni aux communautés Noires ni aux communautés Autochtones. Le manque de représentation des personnes Afro-Autotchones dans les médias a amplifié les sentiments d’exclusion et d’isolement. Cependant, Desiree a récemment découvert une communauté Afro-Autochtones par le biais de TikTok, et a été ravie d’apprendre qu’il y a beaucoup d’autres personnes sur l’Île de la Tortue qui vivent des luttes similaires. En décembre 2020, elle a lancé un appel à cette communauté, ainsi qu’à son réseau personnel, afin d’identifier les personnes qui pourraient être intéressées à partager leur histoire dans le cadre d’un court métrage. Ce projet explore ces histoires et cherche à faire la lumière sur les obstacles uniques auxquels sont confrontés les personnes Afro-Autochtones en Amérique du Nord. Il envisage une opportunité pour les communautés Noires et Autochtones de se rassembler en solidarité contre les systèmes oppressifs qui ont historiquement cherché à les diviser.
Profil de l’artiste: Shar
Je m’appelle Shar et je suis un tatoueur traditionnel à la main. Je suis un résident de première génération de l’Île de la Tortue, d’origine africaine, par le biais de la traite transatlantique des esclaves à travers la Jamaïque. L’art a toujours été un moyen d’expression très important dans ma famille : peinture, musique, pâtisserie, couture, tricot… et pendant longtemps, j’ai eu l’impression que mes compétences artistiques m’avaient échappé. J’avais reçu de nombreux tatouages avant de prendre l’aiguille, et j’ai commencé mon parcours par nécessité – je vivais dans une petite ville où le seul salon de tatouage était tenu par des hommes blancs.

L’exploration de l’histoire du tatouage en tant que forme de modification du corps m’a aidé à plonger plus profondément dans ma pratique, car j’ai réalisé que les tatouages à la main ne sont pas seulement quelque chose que les étudiants font dans un sous-sol poussiéreux. Dans ma pratique, je m’efforce d’offrir aux clients PANDC (Personnes Autochtones, Noir.e.s et De Couleur) une expérience rituelle sécuritaire et accueillante pour créer une œuvre d’art qui les représente, tout en capturant les nuances de leurs diverses origines culturelles. J’ai pu faire des recherches sur d’anciens styles de modification corporelle provenant de cultures du monde entier et travailler à l’élaboration d’un design représentatif de l’héritage d’une personne.
Tout mon travail est effectué à la main (sans machine), avec des groupes d’aiguilles stérilisées et emballées individuellement. Le processus de tatouage à la main prend beaucoup plus de temps que le travail à la machine moderne, et crée un environnement intime, car j’ai le temps de me connecter avec le.a récipient.e. Les personnes peuvent choisir d’apporter des objets pour les cérémonies de purification par la fumée, les offrandes ancestrales ou tout autre objet significatif.
Cette série, intitulée Encre noire sur peau noire, se concentre sur des pièces d’inspiration ouest-africaine pour les enfants de la diaspora. Un clin d’œil à nos ancêtres décorés. Hommage aux motifs complexes du passé. Un rappel de nos origines et de la force que nous possédons pour continuer à avancer.
Je remercie tout particulièrement CRE de m’avoir offert cette opportunité, et Tee (@iamnatteetattoos) de m’avoir soutenu par son mentorat et ses ressources tout au long de ce processus.


Profil de l’artiste: Elsa Mondésir Villefort
Regardez sur Instagram ici
Elsa Mondésir Villefort (she/her/elle) @fabielsah
« Je suis née et j’ai grandi sur le territoire non cédé communément appelé Montréal. Je suis originaire d’Haïti, mes parents sont venus dans les années 80s d’Haïti pour s’installer au Quebec. »
Pour ma participation au projet Black Indigenous Youth Creative Solidarity [ ], je suis vraiment heureuse de participer parce que je pense que je suis prête. The time is now to learn more about Indigenous issues.
J’ai envi de discuter de la question de l’immigration. Les personnes immigrantes arrivent sur un territoire non cédé, qu’est-ce que ça veux dire ? Qu’est-ce que ça veux dire d’arriver sur un territoire qui ne nous appartient pas ?
Détentrice d’un baccalauréat en études internationales spécialisé en science politique, Elsa s’implique auprès de la Commission canadienne pour l’UNESCO à titre de membre du Groupe d’expert.e contre le racisme en éducation et du Groupe consultatif jeunesse en plus d’être gouverneure au Fonds 1804 pour la persévérance scolaire.

Dans les dernières années, elle s’est également spécialisée dans l’intervention auprès de nombreux groupes marginalisés, autant ici qu’à l’international en travaillant au niveau de l’éducation du public en matière de droits humains ainsi qu’à la promotion de la solidarité internationale chez les jeunes. Elsa développe et anime présentement des formations en plus d’accompagner des organisations ainsi que des groupes de jeunes de moins de 35 ans à travers le Québec qui souhaitent se mettre en action et amener des changements durables dans leurs communautés. L’animation d’émissions de radio, la production de podcast et la réalisation d’essais photographiques sont les moyens qu’elle choisit présentement pour s’exprimer et faire entendre sa voix, car elle refuse de se taire.
Pourquoi cette œuvre est incomplète : Les photos de Taïsha ainsi que l’enregistrement de son entrevue ont été faits via Zoom. La distance et l’instabilité de la connexion internet illustrent les obstacles et le travail encore nécessaire pour connecter les narratifs noirs et autochtones. En tant qu’artiste, j’ai beaucoup à apprendre et à explorer. Cette œuvre est une première étape, une introduction. En tant que personne s’identifiant comme une femme noire, il était facile pour moi d’avoir une proximité avec Marina, de la rencontrer et de la prendre en photo. Le travail est encore à faire, les photos floues doivent devenir plus nettes, le grain se transformer en clarté. Le chemin vers la déconstruction peut être long, mais je ne pense pas qu’il faille se laisser limiter par 528km.
Taïsha est une jeune de la Nation Anicinabek du Lac Simon qui vit présentement à Val d’or. Marina est une jeune réfugiée climatique née en Haïti qui vit présentement à Tiohtià:ke, aussi connu sous le nom de Montréal. Elles ont accepté de nous partager leurs réflexions sur les questions entourant les réalités noires et autochtones. Les entrevues ayant été conduites séparément, Taïsha et Marina ne se sont jamais rencontrées et n’ont
jamais entendu ces enregistrements. 528 km les sépare et leurs parcours est loin d’être similaire. Pourtant, ces courts extraits démontrent que, malgré la distance, leurs récits trouvent un moyen de se rencontrer.
Membres de CRE impliqué.e.s
Merci aux mentors et aux conférencier.e.s
Un grand merci aux mentors et aux présentateur.ice.s de l’initiative Autochtones et Noir.e.s solidaires !
Liste des mentors
- Adeline Bird
- Kelly Duquette
- Thomarya Fergus
- Nenookaasi Ogichidaa
- Brianna Roye
Liste des conférencier.e.s
- Kosisochukwu Nnebe
- Victoria Redsun
- Thane Robyn
- Camille Turner
Crédit d’artiste
Les illustrations figurant sur les graphiques de ce projet ont été créer par kaya joan.